LES ACTEURS DU THEATRE DE HUGO
partie 2/2

articles parus dans les Bulletins n°136 et 138 du Club Philatélique de Vélizy-Villacoublay
et dans le n°17 de L'ECHO HUGO (2018), Bulletin de la Société des Amis de Victor Hugo

La Comédie Française

La Comédie-Française, théâtre emblématique : le Français !
Théâtre incontournable pour les comédiens. Un timbre a été émis le 14 octobre 1980 pour les 300 ans de la Comédie Française.



Carte postale N°51 Paris - La Comédie Française

La Comédie Française ou Théâtre Français (surnommé le " Français ") est une institution culturelle française fondée par ordonnance royale de Louis XIV le 21 octobre 1680 pour fusionner les deux seules troupes parisiennes de l'époque : la troupe de l'hôtel Guénégaud (troupe de Molière) et celle de l'hôtel de Bourgogne. L'acte royal leur accorde le monopole de jouer à Paris, que les Comédiens-Français défendront jalousement au cours du XVIII siècle, notamment contre les Comédiens Italiens.



Enveloppe 1er Jour - 14.oct.1980, avec en images, entourant Molière, Rachel et Sarah Bernhardt

Le 5 janvier 1681, les Comédiens-Français se lient entre eux par un acte d'association qui règle notamment le régime des pensions des comédiens retraités.
Bien que mort depuis sept ans quand la troupe a été créée, Molière est considéré comme le " patron " de l'institution, surnommée la " Maison de Molière ". Le fauteuil dans lequel il entra en agonie lors d'une représentation du Malade imaginaire est toujours exposé au fond de la galerie des bustes, après le Foyer Public.

Le 3 septembre 1793, pendant la Révolution, la Comédie-Française est fermée par ordre du Comité de Salut Public, et les comédiens sont emprisonnés. Le 31 mai 1799, le nouveau gouvernement met à disposition la salle du théâtre de la République (salle Richelieu) où jouait Talma, pour permettre aux comédiens de reconstituer la troupe qui n'en bougera désormais plus (sauf durant les périodes de restauration de la salle). En 1812, l'empereur Napoléon Ier, en pleine campagne de Russie, décide de réorganiser la Comédie-Française en signant le 15 octobre, le décret dit " de Moscou " qui comporte 87 articles, et qui reste, à peu de chose près, le statut encore en vigueur aujourd'hui.



Timbre français de 1980


Emblème


Jeton de présence

La composition du timbre de 1980, des 300 ans de la Comédie-Française, reconstitue l'espace de prestigieuse salle, ses balcons et ses loges, ses lumières et son lustre. Cette grande fleur joyeuse éclaire des personnages symboliquement regroupés sur une scène imaginaire.
Les acteurs entourent le maître des lieux, un Scapin-Molière en costume d'époque, auquel le regretté Jacques Charron, en frac anachronique comme pour marquer l'écart du temps, adresse le traditionnel hommage annuel.
Un autre sacrifice de la chronologie, pour équilibrer le dessin fait apparaître à gauche un Figaro, entre le fidèle La Grange, en petit marquis des Précieuses, et les falbalas de Mademoiselle Clairon, dans un rôle d'une pièce de Voltaire.
A droite, la toge de Talma, l'acteur préféré de Napoléon, masque en partie le péplum de la grande tragédienne Rachel. La robe romantique venue des Caprices de Marianne illustre enfin la comédie de Musset, mélange de fantaisie et d'émotion.
Ces trois siècles d'un théâtre, où la tradition n'exclut pas la recherche, aboutissent à notre Comédie-Française, fidèle à l'esprit des grands auteurs de " la maison " ; un Molière catégorique qui dit : " La règle des règles est de plaire ", [auquel Shakespeare semble avoir répondu d'avance d'un titre désinvolte : As you like it, traduit par François-Victor Hugo : Comme il vous plaira".

 

MOUNET-SULLY : Jean-Sully Mounet dit
(27 février 1841 - Bergerac / 1er mars 1916 - Paris 5ème)
297e sociétaire
Entré à la Comédie-Française en 1872 ; sociétaire en 1874 ; doyen de 1894 à 1916.



Carte-maximum

Conservatoire dans la classe de Bressant, Jean-Sully Mounet, dit Sully-Mounet, en sort en 1868 avec un premier accessit de Tragédie et un second prix de Comédie. Il joue, à l'Odéon, des rôles secondaires et, après la guerre de 1870 qu'il fait en qualité d'officier, il participe aux matinées Ballande où le remarque Émile Perrin, administrateur de la Comédie-Française.
Il débute en 1872 dans le rôle d'Oreste, dans Andromaque, mémorable soirée au cours de laquelle le jeune tragédien, par sa beauté, sa fougue, sa conception du rôle obtient un succès prodigieux. Il joue ensuite Le Cid, mais la sauvagerie de son jeu déconcerte et il est obligé de modifier son interprétation avant de devenir " le Rodrigue idéal ", salué par la critique.
Il s'empare alors pour plus de vingt ans de tous les grands premiers rôles tragiques du répertoire : Achille, Hippolyte, Néron, Joad, Horace, Polyeucte... Il joue Orosmane, dans une reprise de Zaïre de Voltaire et donne la pleine mesure de son tempérament dans le drame hugolien, [de Marion Delorme (1873) aux Burgraves (1902) en passant par Hernani, Ruy Blas et Le roi s'amuse.]



Timbre français de 1976

De même, les fureurs shakespeariennes conviennent à sa nature ardente : il fait un triomphe dans Hamlet, puis dans Othello.
Doyen respecté, il se pique aussi d'écrire et interprétera lui-même en 1906 à l'Odéon, avec permission spéciale de la Comédie-Française, La Vieillesse de Don Juan, pièce écrite en collaboration avec P. Barbier. Ses Souvenirs d'un tragédien sont publiés l'année qui suit sa mort. En 1909, il a participé aux premières expériences du Film d'art (Le Baiser de Judas, Macbeth…). Un étonnant document tourné pour Pathé-Journal évoque son interprétation d'Œdipe roi.
Un médaillon, inauguré en 1927 sur les murs-mêmes de la Comédie-Française - galerie Montpensier -, rappelle son souvenir, seul acteur parmi les auteurs dont le profil figure sous les galeries du théâtre.
Rôles hugoliens à la Comédie Française :

" 1873 : Marion de Lorme : Didier
" 1877 : Hernani : Hernani
" 1879 : Ruy Blas : Ruy Blas
" 1882 : Le roi s'amuse : Français Ier
" 1902 : Les Burgraves : Job
" 1902 : Ruy Blas : Ruy Blas
" 1905 : Marion de Lorme : Louis XIII
" 1907 : Marion de Lorme : Louis XIII

 

 

ALBERT-LAMBERT : Raphaël-Albert Lambert, dit
(31 décembre 1865 - Rouen / 1er mars 1941 - Paris)
323e sociétaire
Entré à la Comédie-Française en 1885 ; sociétaire en 1891 ; retraité en 1935 (doyen : 1930/1931) ; sociétaire honoraire en 1936.



Albert Lambert dans Marion Delorme

Fils d'Albert Lambert, acteur de l'Odéon, et élève de Delaunay au Conservatoire, il fait des débuts triomphaux à l'Odéon en 1883, dans Severo Torelli, de François Coppée.
Presque aussitôt engagé à la Comédie-Française, il prend possession de l'emploi des grands premiers rôles tragiques et romantiques.



Beauté, prestance, voix de bronze, éternelle jeunesse, toutes ces qualités lui valent une carrière exceptionnellement longue. Son répertoire, très vaste, marqué par les rôles romantiques (il joue Ruy Blas pendant cinquante ans !) va des rôles antiques (Jason, Polyphème, Œdipe, etc.) aux créations contemporaines, plus particulièrement les fresques historico-sentimentales de François Coppée, Victorien Sardou et Henri de Bornier. Il joue aussi la comédie de mœurs, de Dumas fils à Henri Lavedan et à Paul Hervieu. Il laisse le souvenir d'un Alceste exceptionnel, mais Bajazet, Rodrigue, Hamlet, Roméo, Hernani ont aussi marqué sa carrière, qu'il termine en qualité de doyen de la Comédie-Française.
Rôle hugoliens à la Comédie Française :

" 1901 : Les Burgraves : Otbert
" 1905 : Ruy Blas : Ruy Blas
" 1905 : Marion Delorme : Didier
" 1906 : Hernani : Hernani
" 1907 : Marion de Lorme : Didier
" 1918 : Lucrèce Borgia : Gennaro
" 1920 : Hernani : Hernani
" 1922 : Marion Delorme : Didier

Il participe, également, aux premières expériences cinématographiques du Film d'art.

 

FENOUX : Jacques Fenoux
(24 mai 1870 - Le Havre / 24 juillet 1930 - La-Seyne-sur-Mer)
343e sociétaire
Entré à la Comédie-Française en 1895 ; sociétaire en 1906 ; retraité en 1924 ; sociétaire honoraire en 1925.



Jacques Fenoux dans Les Burgraves

Élève de Maubert au Conservatoire, il remporte deux premiers prix en 1893 et débute aussitôt à l'Odéon dans Vercingétorix (Cottinet) et dans le Fils naturel d'Alexandre Dumas fils, qu'il va jouer plusieurs centaines de fois. Engagé à la Comédie-Française, il obtient l'autorisation exceptionnelle de créer d'abord à l'Odéon, Pour la couronne de François Coppée, qui remporte un très grand succès.
C'est en 1895 qu'il débute à la Comédie-Française, de manière un peu conventionnelle, dans Oreste d'Andromaque. Sa voix forte et bien timbrée, sa prestance, le désignent pour les rôles tragiques et il interprète successivement tous les héros de Racine et de Corneille, de Rodrigue à Néron, d'Hippolyte à Horace, etc. Il est aussi, avec l'autorité que lui confère une certaine sécheresse, Don Carlos dans Hernani et Don Salluste dans Ruy Blas.

Sociétaire en 1906, il aborde avec l'âge les rôles plus marqués de la tragédie.
Après Nicomède (P. Corneille) et Rome vaincue (Parodi), il jouera Félix dans Polyeucte et Auguste dans Cinna, figures " romaines " qui conviennent à son profil de médaille. Il joue avec superbe l'Almaviva du Mariage de Figaro, la tragédie antique (également dans les représentations en plein air), les héros modernes de Pailleron, Dumas fils, Henry Becque, crée Le Cloître d'Émile Verhaeren, L'Hérodienne d'Albert Dubois, L'Ennemi du peuple d'Ibsen, mais il sait aussi, dans la comédie, donner aux personnages secondaires la touche caricaturale ou burlesque : Oronte et Trissotin, Don Guritan (Ruy Blas), les fantoches pittoresques de Molière et Musset...
Rôle hugoliens à la Comédie Française :

" 1896 : Hernani : Hernani
" 1902 : Les Burgraves : Hatto
" 1922 : Marion de Lorme : M. de Laffemas

 

Un théâtre Victor Hugo

Bâti en 1894 à l'emplacement du jardin de l'Elysée-Montmartre, sis au 80 boulevard de Rochechouart, le " Trianon-Concert ", premier nom de la salle est détruite en partie par un incendie en 1900. Un nouvel établissement est reconstruit et est inauguré fin 1902 sous le nom de " Trianon-Théâtre ". Rebaptisée au fil des modes et des circonstances, la salle de spectacle se nomme successivement " Théâtre Victor-Hugo " (1903), " Trianon-Lyrique " et enfin " Trianon ".



Le théâtre Victor hugo avant 1904



Le théâtre Victor Hugo en janvier 1906

D. L. - CPV 155 - Club Philatélique de Vélizy
novembre 2018/janvier 2019
Documents : Daniel Liron (CPV)
Sources : Sites Comédie Française, Wikipédia, autres
Corrections : Danièle Gasiglia-Laster
, (secrétaire de la SAVH)