700 ANS DE POÉSIE

article paru dans le n°22 de L'ECHO HUGO (2023), Bulletin de la Société des Amis de Victor Hugo
article écrit pour l'ECHO HUGO et autorisé par la Société pour sa parution dans le site du CPV

Le 3 mai, en Premier Jour, et le 6 mai, en vente générale, un timbre émis par Philaposte sur la poésie ne peut qu'être relié à notre poète : les "Jeux floraux de Toulouse"


Timbre-poste émis en Premier Jour, 3 mai 2024

Timbre à date Premier Jour

Célébrer le 700ème anniversaire des Jeux floraux en renouvelant l'appel à concourir
aux poètes de langue française du monde entier.

Le 4 mai 2023, l'Académie élargit encore son horizon poétique et géographique en créant trois nouveaux Grands Prix,
dont : - Le Grand Prix Victor Hugo honorera un poème composé par un ou plusieurs jeunes poètes,


Bloc-feuillet émis le 3 mai 2024 dont sont issu les timbres isolés


Timbre issu du bloc-feuillet, au coin haut gauche
Sur la bordure haute, il est inscrit :

Maîtres ès-jeux et lauréats, ... Victor-Hugo...

 


Timbre issu du bloc-feuillet, avant-dernier de la colonne de droite
Sur la bordure droite, il est inscrit :

le Pastel, prix Victor-Hugo des jeunes poètes

 

En 2024, à la faveur des célébrations du septième centenaire de la fondation des Jeux floraux, l'Académie entend créer trois nouveaux prix visant, pour le premier, à honorer l'œuvre d'un poète de langue française d'envergure internationale, pour le deuxième, à récompenser un texte d'un jeune poète, et pour le troisième à couronner la prestation d'un poète slameur.
Ces trois prix seront associés à trois nouvelles Fleurs : la Marguerite, le Pastel et l'Orchidée.

En 1819, le jeune Victor Hugo (17 ans !) obtint un Lys d'or (accordé que deux fois seulement, en 1776 et 1819, instauré pour deux circonstances exceptionnelles, et n'a plus été attribué depuis.) récompense mise au concours par l'Académie toulousaine à l'occasion du Rétablissement de la statue de Henri IV à Paris. Cette rare distinction lui vaudra d'être nommé Maître ès Jeux dès 1820 et d'être, grâce au Secrétaire Perpétuel M. Pinaud, dispensé du service militaire par le Comte de Villèle, Président du Conseil de Louis XVIII et toulousain.

I

Je voyais s'élever, dans le lointain des âges,
Ces monuments, espoir de cent rois glorieux ;
Puis je vous voyais crouler les fragiles images
De ces fragiles demi-dieux.
Alexandre, un pêcheur des rives du Pirée
Foule ta statue ignorée,
Sur le pavé du Parthénon ;
Et les premiers rayons de la naissante aurore
En vain dans le désert interrogent encore
Les muets débris de Memnon.

(1ere strophe sur 3 du paragraphe I sur IV)
Février 1819


Des prix spéciaux ont été décernés : Violier d'or, Muguet d'Argent, …
L'Amarante d'or : remontant à Louis XIV, dont les lettres patentes de 1694 la réservent aux odes, a été décernée au total 123 fois, dont deux fois à Victor Hugo. :
En 1819, les vierges de Verdun, et en 1820, Moïse sur le Nil.


Victor Hugo en 1818 - dessin au pastel

Le 2 novembre 1323, à Toulouse, sept notables se réunissent dans un jardin pour lancer un appel à des joutes poétiques qui devront se tenir six mois plus tard, trois jours durant.
Pour ces amateurs de beaux vers, il s'agit de renouer avec l'esprit des troubadours si présent à la cour des comtes de Toulouse et, alors que la tutelle du roi de France s'étend sur la région, d'affirmer leur attachement à la langue d'oc.

Début mai 1324, poètes du midi de la France et d'ailleurs se pressent à Toulouse pour concourir. Pour fêter l'événement, une pièce d'orfèvrerie, une Violette d'or, est offerte au lauréat par les sept notables et, à partir de 1325, par les administrateurs de la ville : les Jeux floraux sont nés. Au fil des années, ils se pérennisent, sous l'œil vigilant des mainteneurs qui ont succédé aux fondateurs et, à partir du XVIe siècle, sous le patronage de Dame Clémence, figure tutélaire peut-être imaginaire, dont le legs aurait permis de financer les fleurs.

La fête se dote aussi de rites. Les trophées - la Violette, mais aussi le Souci et l'Églantine - sont bénits et portés en procession, un banquet généreux vient clore les festivités. Par la suite, les Jeux s'assagissent : l'ode à la belle dame est remplacée par un hymne à la Vierge, et les dépenses de bouche, jugées excessives, sont revues à la baisse ; ils subsistent néanmoins et, en 1694, Louis XIV en rehausse le prestige en créant l'Académie des Jeux floraux avant que le nombre des mainteneurs ne soit porté de 36 à 40 par Louis XV.

À la Révolution, bien qu'imprégnée de l'esprit des Lumières (Voltaire en est une figure majeure), l'Académie disparaît, elle est cependant rétablie par Napoléon dès 1806. Désormais, ses concours (en français exclusivement depuis le XVIIe siècle, puis en français et en langue d'oc à partir de 1895) ne cesseront plus de révéler ou de consacrer les plus grands poètes de leur temps, comme Victor Hugo, Chateaubriand, Frédéric Mistral, Marie Noël ou Léopold Sédar Senghor.

© La Poste - Marie-Pierre Rey, Professeure d'histoire à l'Université Paris 1 Panthéon- Sorbonne,
mainteneur de l'Académie des Jeux floraux - Tous droits réservés


L'escalier menant aux sept notables, remettant les prix
Carte maximum : Timbre-poste et Oblitération 1er Jour

Clémence ISAURE

Clémence Isaure est un personnage médiéval semi-légendaire, à qui on attribue la fondation ou la restauration des Jeux floraux de Toulouse au début du XVe siècle grâce à un legs par lequel la ville de Toulouse décernerait
chaque année des fleurs d'or et d'argent aux meilleurs poètes.


Médaille des Jeux floraux à Toulouse 1819,
Les fleurs, recto

Médaille des Jeux floraux à Toulouse 1819,
Clémence Isaure, verso

Son nom est attaché à l'histoire de l'Académie des Jeux floraux. Elle aurait redonné du lustre au concours de gaie science, c'est-à-dire de poésie, grâce à ses libéralités à la fin du XIVe siècle ou au début du XVe siècle.
Afin de lui trouver une justification plus ou moins historique, on en a fait un membre de la famille toulousaine des Yzalguier. La rue des Yzalguier reçut en 1806 le nom de rue Clémence-Isaure. Une tour située au 7 de la rue Cujas fut baptisée Tour Clémence Isaure. Elle fut démolie en 1817.
La mythique fondatrice des Jeux est largement célébrée dans la ville, qui lui a consacré des poèmes,
des sculptures, des tableaux, et où son nom est donné à toutes sortes de lieux et institutions.


Toulouse, le Grand Rond, statue de Clémence Isaure
du sculpteur Ducuing : (1868 - 1949)

Les académiciens de l'Académie des Jeux floraux prononçaient son éloge au cours de la séance solennelle de l'Académie.

Son existence a été critiquée dès le XVIIIe siècle car on n'a jamais pu découvrir son testament dans les archives capitulaires, les officines notariales, les greffes du sénéchal ou du parlement. S'il n'a pas été possible de trouver un testament de Dame Clémence Isaure dont le nom n'apparaît qu'au milieu du XVIe siècle, il a été trouvé dans le registre des comptes municipaux de la ville de Toulouse pour l'année capitulaire 1488-1489 une citation d'une Dame Clémence faite par Bertrand de Brucelles, trésorier de la ville :

Dame Clémence devient Dame Clémence Isaure.
Dans leur volonté de rendre crédible la légende de Dame Clémence, une statue de femme se trouvant sur un tombeau de la basilique de la Daurade [basilique Notre-Dame de la Daurade à Toulouse] est apportée dans le Grand Consistoire de la Maison Commune. Une ballade de Pierre de Saint-Anian, datée du 3 mai 1549, célèbre ce transport. Elle est intitulée : Ballade sur l'épitaphe de Dame Clémence Isaur, trouvé à son sépulchre de la Daurade, qui institua les Jeux floraux à Tholose, de laquelle avons la statue de marbre céans apportée dudict sépulchre.

En 1557, Pierre de Garros écrit un sonnet sur le même sujet.
La statue est retouchée d'après un constat fait le 7 août 1627. Pour les membres du collège, cette statue provient de l'église de la Daurade et serait celle de Dame Clémence de la famille Yzalguier dont plusieurs des membres ont été Capitouls.

En 1562, tous les mainteneurs sont des membres du parlement. Tous, sauf Jean Coignard, étaient calvinistes et la plupart ont dû quitter Toulouse. Les jeux n'ont pu se tenir en 1563 et 1568. Le 1er avril 1569, la semonce est faite par le seul mainteneur restant, Charles Benoist de Sépet qui demande aux Capitouls d'ajourner les jeux. Après les troubles de la Ligue et les suites du massacre de la Saint-Barthélemy, le Collège de Rhétorique se réunit pour la semonce le 1er avril 1573 malgré les troubles. C'est dans le compte-rendu de cette réunion qu'apparaît pour la première fois le nom de Dame Clémence de Ysalguy qu'on peut rattacher à la famille Ysalguier.


Clémence Isaure, Dame de Toulouse
née vers 1460 et mourut vers 1513
Collection Frères Neurdein

Clémence Isaure
Carte format d'identité en carton épais
Photographe Jules Lefebvre
épreuve argentique contrecollée sur carton H. 7,4 ; L. 4,2 cm
 

En 1575 Dame Clémence prend le nom de Dame Clémence Isaure, dans le " Chant royal " de François de Clary qui a été premier président du parlement de Toulouse de 1611 à 1615. Jean-Papire Masson va poursuivre
l'œuvre de construction de la légende de Dame Clémence Isaure commencée par Marin de Gascons en
rédigeant l'Éloge de Clémence Isaure, en 1594. Pierre de Caseneuve a rédigé un traité sur l'Origine des Jeux-fleureaux de Toulouse publié après sa mort par Monsieur Medon en 1659 dans lequel il montre que les Jeux floraux n'ont pas été créés par Clémence Isaure, mais par les sept troubadours.

 
 

Cartes souvenirs de l'association philatélique : Union Philatélique Toulousaine

Les réfutations de Guillaume Catel qui avait montré l'invraisemblance, sinon l'impossibilité, des différents legs mentionnés sur l'épitaphe placée au pied de la prétendue Clémence Isaure,
sont reprises par Charles Lagane en 1773.

Cependant le mythe de Clémence Isaure a encore de nombreux partisans dont :

- Victor Hugo, Odes et Balles, 1822
" Aussi belle qu'à sa naissance,
votre muse se rit des ans et des douleurs ;
le temps semble en passant respecter son enfance ;
et la gloire, à ses yeux se voilant d'innocence,
cache ses lauriers sous ses fleurs "

- Charles Cros, La Vision du grand canal des deux mers, 1888.
" Toulouse ! ville antique où fleurissent encore
Pour les poètes, vos fleurs d'or, Clémence Isaure, "

Outre le monument au milieu du bassin du Grand-Rond à Toulouse (carte postale précédente),
une statue de Clémence Isaure est placée dans la galerie de l'hôtel d'Assézat (carte postale ci-après),
siège de l'Académie des Jeux floraux.

Galerie Clémence Isaure, Hôtel d'Assizat
(La statue est en bout de la galerie, à droite de la carte postale)
La statue Clémence Isaure à l'hôtel Assézat
Cliché Janson- Editeur LF Toulouse


L'Hôtel d'Assézat ou de Clémence Izaure
Phototypie Labouche frères - Toulouse
(La galerie Clémence Isaure est à gauche de la carte postale)


Une fontaine avec statue de
Clémence Isaure située
place de la Concorde à Toulouse.
Sculpteur Léo Laporte-Blairsy
(1865-1923)

Au jardi du Luxembourg à Paris
une statue de Clémence Isaure
a été élevée.
Sculpteur Auguste Préault
(1809-1879)
Photos Wikipédia

 

Daniel LIRON- Philatéliste et Cartophile
mai 2023
Avec la participation de la Secrétaire de la Société des Amis de Victor Hugo
Sources: La Poste - l'Union Philatélique Toulousaine -
Axel Dubout, membre de l'Académie des Jeux floraux -
Wikipédia: Académie des Jeux floraux, Clémence Isaure, Hôtel d'Assézat -
Gallica : Recueil de l'Académie des Jeux floraux